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L'histoire de l'industrie textile de Laroque par Henri Aussaguès

« Sous la Royauté, avant la Révolution de 1789, Laroque était le poumon économique de la seigneurie de Mirepoix. Le textile lavelanétien n’existait pas.

Quant au textile laroquais, il connut son apogée en 1507, lorsque Jean  V  de Lévis, seigneur de Mirepoix-Laroque, accorda une charte au textile laroquais, lui donnant à jamais ses titres de noblesse, tel un grand cru du Bordelais.

Il faut savoir que la  bonne fortune industrielle de Laroque fut longtemps liée à la fabrication de draps verts à destination du Levant, c'est-à-dire  des Turcs qui n’avaient pas d’industrie textile et qui étaient friands de cette couleur. Ces fameux seizains, draps étroits aux quatorze nuances  de vert, cheminaient par Chalabre, Carcassonne et le port de Marseille.

Les guerres de religion et la suppression des subventions à l’exportation par Colbert rendirent bientôt le tableau moins idyllique.

 Après la Révolution de 1789, de nouvelles machines rapidement rentabilisées venues du Chalabrais, du Carcassonnais et des anciennes manufactures royales de l’Aude, modernisèrent miraculeusement toutes les phases de la fabrication du tissu en aval et en amont du tissage qui resta manuel. Ces machines renouvelèrent notamment  le cardage, le filage, la tonte du tissu, la teinture à la pièce, le séchage se faisant toujours au vent.

La seule force énergétique disponible a cette époque était la force motrice des canaux que les Laroquais avaient eu l’intelligence de construire depuis 1398, canaux qui faisaient tourner des moulins fariniers, des moulins drapiers et des tanneries, les mécanismes étant rapidement interchangeables.

Ces moulins foulons battants qui actionnaient une batterie de maillets étaient indispensables à l’industrie textile car ils permettaient de resserrer les fibres en utilisant la propriété de feutrage de la laine. Cette opération essentielle, magnifiée par la qualité intrinsèque des eaux du Touyre, faisait en sorte qu’au final le tissu de type cardé ne ressemble pas à une serpillère.

A Laroque, les Sage et les Maurel mirent la main, en une centaine d’années tout de même, sur la majeure partie des moulins disponibles sur les canaux, les transformant en petites fabriques. Quant aux industriels chalabrais comme les Dumas et les Dumons qui voulurent se lancer dans le textile, ils n’eurent pour autre solution que celle de se rabattre sur Lavelanet qui commença ainsi son développement industriel.

A cette époque, le club de rugby laroquais eut son premier terrain de jeu, dit du « sandal, » nom d’une tannerie utilisant le bois exotique de santal ou sandal qui avait la faculté de rendre imputrescibles les peaux de moutons, moulin situé non loin du canal près du LIDL actuel.

 Plus tard, apparut un second terrain de jeu, situé au lieu dit                                          « Castillane »  au bout d’une vaste prairie appartenant originellement aux Sage qui y faisaient paître leurs moutons dont ils mélangeaient la laine à celle importée de Castille, la meilleure de l’époque.

 A partir de 1880, en schématisant un peu, les Sage passèrent la main aux Ricalens et les Maurels aux Fonquernie.

Ces nouveaux industriels bénéficièrent de l’éclairage par lampe incandescente.

Les débuts de l’hydroélectricité, « la houille verte, » permirent d’abord  le travail de nuit puis peu à peu, à partir de 1911, la mécanisation  progressive des métiers à tisser qui passèrent du bois à la fonte.

Un mixte énergétique eut lieu avec la machine à vapeur qui bénéficia de  l’arrivée du chemin de fer à Laroque et Lavelanet en 1903 apportant la houille nécessaire à son bon fonctionnement. Les hautes cheminées balisèrent désormais le paysage et ornèrent le papier à en-tête des usines.

En 1924, lorsque l’étoile sportive prit naissance, les ouvriers, désormais spécialisés, étaient regroupés dans deux grandes usines à l’architecture emblématique faits de toits en dents de scie, les fameux sheds.

 La demande croissante de main d’œuvre après la guerre de 14-18  favorisa  la venue d’ouvriers espagnols, ce qui entraîna des mouvements syndicaux et des grèves, comme celle de 1926..

La fée électricité, plus facile à utiliser que la vapeur, devint omniprésente à partir de 1930-1935 et fit disparaître toutes les courroies de transmission qui encombraient les usines. Elle permit  désormais l’autonomie et la dispersion  de certains ateliers spécifiques ainsi que le travail à domicile des tisserands.

A Lavelanet, le tissu industriel, avec des usines employant de 150 à 200 ouvriers, était plus dense mais moins concentré qu’à Laroque qui employait  960 ouvriers chez Ricalens et 560 chez Fonquernie soit la moitié des ouvriers du Pays d’Olmes. Sur 548 tisserands à façon, on en comptait 486 à Lavelanet et Laroque réunies.

A partir de 1950, il y eut 102 entreprises en Pays d’Olmes, 3 500 ouvriers et 50 artisans indépendants. Pays d’Olmes qui devint le premier centre de textile cardé français se caractérisant par le tissage de fibres courtes, imparfaitement démêlées, donnant à l’étoffe un aspect grossier.

Cardé qui n’allait pas tarder à être concurrencé par les nouvelles fibres synthétiques qui firent leur apparition sur le marché dès l’après guerre de 1939-45.

 Ricalens ferma ses usines en 1953 mettant un millier de salariés au chômage ce qui entraîna la mise en sommeil de  l’Etoile sportive pendant deux saisons.  

La nature ayant horreur du vide, Michel Thierry, qui avait débuté dans le cardé, décida d’adopter les nouvelles fibres synthétiques et se diversifia dans la production de tissu féminin puis de tissu pour l’automobile.                               

André Roudière, qui avait commencé à Lavelanet en 1947 avec deux métiers à tisser, fit la même analyse. Son tergal connut un succès exceptionnel qui fit de son groupe la première entreprise européenne de tissage pour l’habillement. En 1973, 5 000 ouvriers travaillaient dans 72 entreprises en Pays d’Olmes.

  Hélas, la crise atteignit bientôt les tisserands-patrons qui ne surent pas faire le saut de la fibre synthétique et Fonquernie ferma ses portes  à son tour en 1980, 30 ans après Ricalens.

 Michel Thierry, qui disposait alors de 11 usines en Pays d’Olmes, Roudière et la Sotap-Carol, lissèrent les nombreuses pertes d’emplois, ce qui eut moins de retentissement sur  la vie de l’Etoile sportive laroquaise.

.  Roudière à lui seul employait 2369 salariés en 1977 et 2500 en 1987.

La mondialisation jeta bientôt un pavé dans la mare. Roudière, passé sous le contrôle de Chargeurs, n’eut pas d’autres choix que de délocaliser une partie de sa production. En 1989, il procéda à un premier plan de licenciement de 200 ouvriers suivi d’un autre de 745….Le groupe fut ensuite divisé en quatre entités facilitatrices de licenciements futurs…

Au final et pour faire court, seule l’entreprise Michel Thierry, fournisseur des principaux fabricants d’automobiles, résista véritablement avec 720 salariés.

Ces superpositions d’époque, ces destins étonnants de dynasties familiales, ces productions prestigieuses, ces traumatismes, ces amitiés, ces solidarités, influèrent sans nul doute sur l’identité de l’Etoile sportive laroquaise. »

Henri Aussaguès.

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